14 juillet 2005
La détente de l'été

La détente de l'été commence à faire effet sur moi. Je suis de bonne humeur, voilà tout. Je soigne les plantes, rempote un cactus. Il me semble que je les vois sous un angle différent. Ou plutôt, je les vois, alors que depuis quelques mois, je les arrosais, si je les arrosais, sans les voir. Ce n'est pas pour rien qu'en ce moment j'ai des plantes vertes mais pas une seule fleur au perchoir.

J'ai mis une robe légère alors que je n'ai pas quitté mes pantalons depuis des mois. Je suis allée voir l'hygiéniste dentaire et j'étais même distraite quand elle s'acharnais sur le détartrage. Elle qui me faisait toujours un peu mal, à moins que ce soit moi qui, trop stressée, était sensible jusqu'à la racine des gencives!

Je m'écoute donc respirer par tous les pores de ma peau et je suis presque étonnée. Peut-être me suis-je sentie sur la corde raide depuis plusieurs mois, sans m'en rendre compte. Ce matin je disais aux fils que je ferai un repas au perchoir, s'ils peuvent y être. Le troisième n'y sera pas mais cela ne m'a pas arrêtée. J'ai fait le marché. J'ai pris un petit pot de mayonnaise Hellman pour remplacer le gros pot format familial qui a fini par passer. Je n'ai pas eu de pincement au coeur. C'est dire que je suis peut-être entrain de me guérir, avec rechutes possible, je le sais, du syndrôme de la "mère de famille nombreuse" dépossédée de son titre, et de ses pouvoirs, par la force des choses. Dans les faits, mes petites casseroles presque neuves commencent à servir, alors que mes énormes wok et marmites prennent leur distance. Je devrais, moi aussi.

Ce midi, nous sommes allés manger du calmar frit avec une salade à la grecque. Un plat pour deux, c'est bien suffisant. Et je me surprend à dire d'un ton badin à mon mari qui a, pour ceux qui ne le savent pas déjà, le même âge que moi: "Qu'en penses-tu, je veux m'abonner au magazine "Bel Âge". C'est intéressant!" Je suis sérieuse bien sûr. Comme dans ces cas-là, il rit, un peu amusé. C'est notre façon de marquer le pas, si vous voulez, vers un âge mur et assumé. L'autre jour, à la télé, on parlait d'un accidenté de la route en le désignant par le terme de quinquagénaire. Qu'est-ce que c'est pas beau! Cela aurait pu être moi ou lui, mon mari. Lui et moi, ensemble, c'est plus de cent ans là! L'âge est quelque chose de fascinant alors que l'on peut se sentir si fragile, ou neuf, ou enfant. Ou parfois si vieux, si usé, si vidé.

Dans l'air du temps, je viens de dire à ma voisine d'en bas que je prendrai la bicyclette à trois roues presque neuve de son mari décédé. Une vraie bicyclette de pépère avec un grand panier à l'arrière et un drapeau orange flottant sur une tige souple bien haute. L'année dernière je ne pourrai envisager me promener avec ça. Aujourd'hui, je suis presque attendrie de m'imaginer avec cet attirail.

Cet après-midi, l'évier de la cuisine s'est bouché. Mon mari n'a rien pu faire et notre plombier ne viendra que demain. Mais j'ai quand même fait mon repas, sans que mon humeur ne soit altéré. Une salade toute bio aux crevettes et filets de porc froid, coupés en lanières.

Je lis en paresseuse des bribes de tout ce qui me tombe sous la main. Comme la préface de Fidel Castro pour le journal de Bolivie de Che Guevara. Et je tourne autour de quelques livres avant de m'y plonger pour de bon. Il sera temps puisqu'une cinquantaine attend d'être lue ...

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