16 septembre 2003
Rêves et réalités

Il y a ce marcheur immobile, Zénon, qui me donne à lire des choses lumineuses comme celle-ci:
" Vivante, ainsi que ces animaux domestiques dont il faut prendre soin, la bibliothèque privée exige qu'on lui soit attentif. De la même façon qu'on change une plante de pot, on disposera peut-être autrement le contenu de ses rayonnages. Cette configuration nouvelle lui procurera un peu d'air, elle en détendra ses membres. Vivre avec sa bibliothèque, c'est vivre au côté d'un être tout à la fois paisible et imposant, mais fidèle, d'une présence qui sait en même temps rester constante et se faire oublier. Chacun veille sur l'autre et, par nécessité, ainsi en vient-on à se détourner légèrement de soi. Un pareil assemblage de voix distrait. Les livres dans un même ensemble laissent sourdre un imperceptible vrombissement, comme le bruit d'une machinerie invisible en arrière-fond. Toutes ces paroles, qui demeurent en puissance, n'attendent qu'un signe de vous, que l'occasion de se faire entendre et l'une d'elles, quand vous le jugerez utile, saura bien s'extraire du lot, venir jusqu'à vous et, droit au coeur, vous toucher."
Alain Nadaud, Le jardin privé in La Bibliothèque, Autrement # 121, Extrait : p. 211

Cette nuit, j'avais rêvé longuement, me réveillant le corps moite. J'avais rêvé une longue histoire, avec des personnages bien vivants, presque palpables, sans aucun rapport avec la réalité. Dans le rêve, je faisais du "counceling" matrimonial, pas de blague. Mais ce n'était pas une affaire privée, c'était assez publique, comme un plaidoyer en cour, avec témoignages et preuves à l'appui.

Ce matin, sans crié gare, quelqu'un m'a fait des confidences, vrai de vrai, et j'ai conseillé comme une grande, mais très privément, je vous l'assure!

Un mal de tête latent me gâche l'après-midi. Au souper nous servons une table pleine de restes du frigo qui respire mieux depuis! Après souper, nous sommes partis nous promener un peu en direction du Vieux Montréal. Nous sommes entrés voir un nouveau projet d'appartements: rêve d'un avenir prévisible où nous ne tenons qu'un pied-à-terre ultra-pratique en ville. En sortant de là, nous sommes retournés à la réalité: le perchoir est petit et les fils grandissent ... Un jour prochain, il faudrait repousser les murs du perchoir, ou trouver un plus grand nid, ou laisser partir les jeunes coqs du bercail!

Il y a eu l'écho de quelqu'un qui est retourné à ma ville natale et qui travaille maintenant à l'Université, contre un petit salaire, un appartement doté d'un micro-onde et d'une laveuse, et qui disait que le doyen en appelle à la collaboration de d'autres encore, pour aider ma ville. Il y a que j'ai toujours rêvé passer quelques mois par année dans ma ville natale, pour redonner à ma ville, encore mieux, à mon alma mater. Je ne pensais même pas me faire payer. Imaginez qu'il y a cette piste et mon premier réflexe a été sur la réalité de laisser les miens et Montréal pendant plusieurs mois ... Suis-je si prête? De la coupe aux lèvres, il y a la conviction profonde d'une contribution sociale. Et puis, je reçois ce site promotionnel sur ma ville! Les attraits touristiques, les photos, les mémoires de l'histoire, etc. tout y est dans les règles de l'art. Comme d'autres sites sur là-bas, il y a un grand trou sur l'histoire récente, pas d'écho sur environ 20 ans. La victoire du peuple c'était contre les français d'il y a 50 ans! Donc, je parcourais ce site avec plaisir jusqu'au moment où, d'un clic, j'arrive sur un article fourni sans doute par le camarade du parti au pouvoir, truffé de langage de propagande. Ma lecture leva un voile sur ce qui se passait à ma ville, après que je l'ai quittée, en avril 1975, jusqu'à la réunification des deux Viêt-Nam, quelques semaines plus tard. Peu de détail mais le ton, le vocabulaire de l'article ... me ramènent sur la raison pourquoi j'ai quitté, il y a 28 ans!

Rêve et réalité! L'humilité de l'un contre la platitude de l'autre! Il ne faut jamais confondre le sol sur lequel on se tient, utopie ou rédemption! Après tout, je suis bien loin de transporter avec moi, une partie de ma bibliothèque, pour renouer cette aventure en mon pays lointain!

hier consulter les archives demain

retour à la page principale

1