29 février 2000
À fleur de peau

Peau de cochon ou peau de soie, je ne sais pas, mais je le suis actuellement,... à fleur de peau! Si j'ai une peau de cochon en surface, c'est une peau de soie en-dessous, alors des écorchures vives, cette semaine. Infligées par d'autres (quel Autre plus représentatif que ton conjoint) et bien mal reçues en ce moment. Alors le ton monte et je m'étouffe (effectivement, au sens propre du terme). Et je suis déstabilisée pour la journée! Le seul autre qui a ce pouvoir, c'est cet Autre-là! Les américains ont un terme pour désigner ce genre d'"autres": "the significant others" (les Autres qui ont une signification pour toi). Seul bénéfice du doute possible: Monsieur est aussi à fleur de peau actuellement que moi! La différence est que je le reconnais, pas lui. Ou bien c'est lui qui a la peau de cochon et moi, celle de soie!

Dimanche dernier, après le dernier client de la semaine qui m'a accaparée un grand bout de cette si belle journée, je me suis sauvée vers le Nord où m'attendait mari et enfants, en plus de deux de mes soeurs. J'arrive à destination, le ventre vide, la tête pleine, le corps bien las. Hier lundi, j'ai tout fait pour me changer les idées: des petites marches, un sérieux pelletage de neige pour dégager le patio en arrière et une fixation devant le feu de foyer! Une invitation à souper m'a sauvée des casseroles et d'une soirée vide. La nuit repose à peine.

Ce matin, sous un ciel bleu impeccable, au bord du lac blanc et gelé, je me suis couchée sur un parapet de ciment pour essayer de détendre ce corps crispé et ôter ce boulet sur la poitrine. Juste quelques larmes du trop plein puis je repars déjà vers ces enfants qui me semblent si dissipés quand moi j'ai besoin de paix, et ce mari si froid et rude quand moi j'ai besoin de douceur et d'attention.

Cet après-midi, enfin j'ai la petite maison pour moi, les garçons sont sur les pentes de ski et le mari rentré plus tôt en ville. Faire le ménage fut un geste de réappropriation, une activité réparatrice. L'accalmie fut brève: invasion du beau-frère, de la belle-soeur, de leurs deux tourbillons avec un petit chien à la traîne. J'ai préféré m'esquiver vers la ville, sous prétexte de clients éplorés, abandonnant le fort pour deux jours. De refuge (dans le coeur de mon plus jeune fils et de moi-même), la maison devient halte-parenté. La logique de mon coeur généreux brime l'attachement de mon coeur de solitaire. Je ne suis pas trop contente de la situation, tout en sachant que j'en suis aussi la responsable.

Je suis chez moi ce soir, sans me sentir chez moi, oppressée par la ville, opprimée par la perspective de devoir me remettre en action dans la demie-heure qui suit, le corps toujours las, l'âme en peine. L'épaule coussinée où je me reposait est de pierre et de glace depuis quelques temps. Une question de dérèglement de biorythmie ou un état de fait qui s'installe?

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